Le chaos et l'écologie.

La biologie des populations a beaucoup appris sur l'histoire de la vie, sur l'interaction des prédateurs et de leurs proies, sur la manière dont un changement de densité de population d'un pays influe sur la propagation des maladies. Si un modèle mathématique donne une croissance, un équilibre ou une extinction, les écologistes peuvent en déduire partiellement les circonstances qui conduiront une population ou une épidémie réelles vers une évolution identique.
Une simplification efficace consiste à simuler le monde sur des intervalles de temps discrets, comme une aiguille de montre à quartz qui se meut par à-coups chaque seconde au lieu de se déplacer uniformément. Si les équations différentielles décrivent des processus qui évoluent continûment au cours du temps, elles sont par ailleurs, difficiles à résoudre. Pour les processus évoluant par sauts, on peut utiliser des équations plus simples, les équations aux différences. Par chance, de nombreuses populations animales évoluent par intervalles réguliers d'une année, et leur variation d'une année sur l'autre a souvent plus d'importance que leur évolution continue. 
Au contraire des êtres humains, de nombreux insectes, par exemple, s'en tiennent à une unique saison des amours, de sorte que leurs diverses générations ne se chevauchent pas. 
Pour différentes prédictions (épidémies, évolutions des populations, etc.), un écologiste n'a pratiquement besoin de connaître que les chiffres de l'année courante.
Les mathématiques de l'écologie sont un bon ensemble de règles de travail, mais pas trop compliquées. Par exemple, pour décrire une variation annuelle de population, un biologiste utilise un formalisme aisément accessible avec peu de connaissances mathématiques. De nombreux types de fonctions sont possibles. Une approche naïve de la biologie des populations consisterait à prendre une fonction qui chaque année accroît la population dans un rapport fixe. Il y a quelques dizaines d'années, les écologistes ont pris conscience qu'ils devaient mieux faire. Le choix le plus naturel de croissance est une fonction qui grimpe en flèche quand la population est faible, ramène la croissance au voisinage de zéro pour les valeurs intermédiaires et s'effondre lorsque l'on atteint la surpopulation. En effectuant ses itérations, l'écologiste pourra alors observer le comportement à long terme de sa population, laquelle atteindra probablement un état d'équilibre. Il suffit alors de trouver le modèle d'équation correspondant à ces assertions. 
Dans les années cinquante, plusieurs écologistes envisagèrent des variantes de cette équation particulière appelée "équation logistique". Le paramètre important de ces équations était le taux de croissance, ce que les écologistes comprirent rapidement. Dans les systèmes physiques dont dérivaient ces équations, ce paramètre correspondait à la mesure de non-linéarité. L'équilibre atteint par une population sera d'autant plus bas que ce paramètre est faible et inversement. Mais, ceci n'est pas vrai pour toutes les valeurs de ce paramètre. La convergence vers une valeur d'équilibre ne se fait pas toujours.
Pour ces valeurs pour lesquelles aucun état d'équilibre n'est atteint, les écologistes pensaient que la population oscillait autour d'un équilibre sous-jacent. Mais ils ne savaient pas que l'équilibre peut ne pas exister. C'est ce que l'on appelle le chaos.

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